A peine quelques jours après la parution par l'écrivain
Richard Millet du court texte Eloge littéraire d'Anders Breivik,
le 24 août 2012, un emballement médiatique s'est déclenché. Tout ce que
Paris compte d'intellectuels, d'écrivains, grands et petits, de penseurs,
de critiques littéraires, de censeurs autoproclamés, s'est mobilisé pour
organiser la mise à mort sociale, littéraire, intellectuelle, de Richard
Millet.
Qui a vraiment lu le texte de Millet ? Très
rares ont été ceux qui ont accepté de débattre avec lui. Le Clézio,
Annie Ernaux, à l'origine d'une pétition, Bernard-Henri Lévy, et
d'autres participent à la curée. Ils auront gain de cause : le 13
septembre 2012, Richard Millet doit démissionner du comité de lecture de
Gallimard, tout en continuant son travail d'éditeur. Les pressions
médiatiques et les réactions individuelles l'ont emporté.
Dans la France du début du XXIe siècle, le débat d'idées serait-il devenu
impossible ? L'autre, celui qui professe une opinion différente, est
refusé, rejeté, mis au ban, considéré comme un menteur et, insulte
devenue courante, comme un fasciste. Une chape de plomb semble s'être
abattue sur la vie intellectuelle et littéraire, où toute idée
dissonante, tout propos dérangeant est immédiatement disqualifié.
Le moralisme et l'antiracisme, nouveaux dogmes imposés à toute la société,
se sont mués en maccarthysme. La France est-elle entrée dans l'ère du
terrorisme intellectuel ?